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Page:Myrand - Noëls anciens de la Nouvelle-France, 1899.djvu/135

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NOËLS ANCIENS

“ Vous me l’avez dit, souvenez-vous-en ; ” — “ les Quatrains ” de Pibrac[1] ; — “ l’air de Joconde ; ” — “ les Folies d’Espagne ; ” — “ Un mitron de Gonesse. ”

Je crois être agréable à mes lecteurs, en publiant — comme spécimen de la musique en vogue au dix-septième siècle — un air de vaudeville qui me paraît absolument distingué. Je regrette de n’en pas connaître l’auteur car il mériterait, certes, l’honneur d’être nommé. Le charme de la mélodie trahit un artiste, comme la phrase bien faite, correctement écrite, signale un véritable maître.

Prends, ma Philis, prends ton verre,
chante la vaudeville.

Quelle était cette Philis de la chanson à boire ? La même, sans doute, qu’aimait Oronte dans le Misanthrope de Molière, l’inspiratrice du fameux sonnet de Bencérade :

Belle Philis on désespère,
Alors qu’on espère toujours !

Mon imagination y croit sincèrement, mais sa conviction, pour ferme qu’elle soit, n’entraînera personne. La foi, sans les preuves, est une foi morte. À tout événement, si la Philis du vaudeville fut aussi belle que sa mélodie, elle méritait bien le Champagne sablé en son honneur.

Prends, ma Philis, prends ton verre,

Elle semble éclose, cette musique, de la fraîcheur de son teint, de la douceur de son regard, de la gaieté de son sourire voilé de mélancolie, ce qui étonne un peu dans une chanson à boire. C’était peut-être un toast d’adieu porté à la charmante Philis. Aussi bien cet air de vaudeville semble-t-il mieux convenir aux joies plus discrètes, aux émotions plus tendres d’une pastorale, qu’aux bruits tapageurs d’un refrain bachique. Faites-

  1. Dufaur de Pibrac (1529-1586).