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NOËLS ANCIENS

suis exilé moi aussi. Ce que vous éprouvez ne m’est pas étranger. Il y a une moitié du peuple canadien-français qui n’habite plus la province de Québec et qui, nécessairement, a laissé en arrière bien des souvenirs. Les chants de Noël sont de ce nombre ; ils nous portent au cœur ; ils nous disent des choses qu’ils ne disaient pas autrefois.

Ah ! comme les vieux airs qu’on chantait à douze ans
Frappent droit dans le cœur aux heures de souffrance,
Comme on se sent ému, comme on se sent loin d’eux !

« Bien que la musique des cantiques de Noël semble plaire médiocrement à l’école moderne, elle attire les penseurs, parce qu’elle renferme en elle-même la marque d’une très ancienne facture. Ancienne assurément. Ces « notes » étaient déjà regardées comme d’un grand âge lorsque les Pères jésuites les faisaient chanter à Québec, il y a deux cent cinquante ans. Leur grâce facile, simple et inimitable s’était fait sentir à bord des navires qui avaient amené au Canada ses premiers explorateurs, puis ses premiers colons, car c’est de France que sont venues, avec nos pères, les strophes dont nos églises retentissent encore aujourd’hui. Et qui sait où nos ancêtres étaient allés les prendre ?

« À n’en pas douter c’est une musique du Moyen-Age. Direz-vous que, par un tour de passe-passe, nous avons ainsi conservé un reflet de la Grèce ou de l’Italie païennes ? Pour répondre, il faudrait expliquer ce que sont devenues les compositions des maîtres de l’Antiquité. Nous sommes dans le vague à cet égard. Affirmerez-vous que Ça, bergers, assemblons-nous a été joué sur la flûte, au théâtre d’Athènes, du temps de Périclès ? La preuve en est difficile à faire, mais la naïveté de cette musique est certainement des plus anciens jours des peuples civilisés.[1]

  1. À la date du 1er janvier 1898, l’auteur célèbre du Voyage aux Pays Bibliques, M. le chanoine Le Camus, n’écrivait-il pas dans La Quinzaine de Paris (page 45) : « Dans tout pays, rien ne