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Page:Myrand - Noëls anciens de la Nouvelle-France, 1899.djvu/70

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NOËLS ANCIENS

« Ce sentiment de Gérard de Nerval, je l’ai éprouvé quelquefois d’une manière intense. Cette musique d’ancienneté dont on amusait ma première jeunesse et que j’avais oubliée, reparaissant tout à coup, de longues années plus tard, me bouleversait. Cela pénètre, envahit le cœur, réveille des souvenirs, nous jette dans des réminiscences sans fin. »

Bravo ! monsieur Benjamin Sulte, bravissimo ! Je voudrais même lui crier avec la foule dont il traduit merveilleusement l’émotion : Encore ! encore ! comme au théâtre.

Je n’affirmerais pas cependant que


Ça, bergers, assemblons-nous


ait été joué sur la flûte, à Athènes, du temps de Périclès[1], pas plus que je ne voudrais répondre à l’insidieuse question de sir Thomas Browne : Quelles chansons chantaient les Sirènes ? Mais, par contre, ce que je jurerais bien, en toute sécurité de conscience historique, c’est que la musique du futur Ça, bergers, assemblons-nous, fut chantée à Stadaconé, le jour de Noël 1535, dans l’entrepont de la Grande Hermine, par les équipages réunis de Jacques Cartier. Seulement, au lieu du cantique de Pellegrin, qui ne devait être composé que deux siècles plus tard, les compagnons mariniers du Capitaine-Découvreur chantèrent le noël populaire du seizième siècle :

  1. Un contemporain de Nicou-Choron, Jean-François Le Sueur (1763-1837) maître de chapelle de Napoléon Ier, de Louis XVIII et de Charles X, l’émule de Cherubini et presque son égal dans la musique religieuse, prétendait sérieusement que les vieux noëls français remontaient tous au temps de la primitive Église. « C’est de l’Orient, disait-il, qu’ils ont passé dans les Gaules par les anciens troubadours provençaux, et les premières églises chrétiennes les avaient reçus des anciens Hébreux, » Toutefois, cette belle assurance me laisse un peu incrédule.