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RIMBAUD 9

plein de mesure et de civilité. Pas de terrain moral dans cette âme ; les semences qui y tombent, ne rencontrent rien qu'une dévorante absence par quoi tout de suite elles sont volatilisées.

Rimbaud parle de sa mère non pas grossièrement, mais avec une sécheresse brutale, avec une aridité impitoyable : " La mother m'a mis là dans un triste trou. " ^ " La mère Rimb {sic) retournera à Charlestown, etc. " ^ Elle ne lui est rien et son indifférence pour elle semble tranquille, com- plète, sans restrictions intimes, sans remords. Il refuse de tenir compte de ses volontés, et de cette insoumission, il ne pense même pas à s'expliquer avec elle. C'est à un étran- ger qu'il écrit : "... J'ai fini par provoquer d'atroces ré- solutions d'une mère aussi inflexible que soixante-treize administrations à casquettes de plomb. — Elle a voulu m'imposer le travail perpétuel, à Charleville (Ardennes) ! Une place pour tel jour, dirait-elle, ou la porte. — Je refusai cette vie ; sans donner mes raisons : c'eût été pitoyable. " ^

Même indifférence à l'égard de la patrie : " Quelle horreur, que cette campagne française ! " ^ Au moment où les Allemands pénètrent en France, il se plaint, avec une amertume qu'il ne soupçonne nullement d'être déplacée, que Paris n'envoie plus de livres aux libraires de Charle- ville. Et voici sous quelles couleurs lui apparaît l'héroïsme de ses concitoyens :

1 Lettre de mai 1873 à E. Delahaye, p. 52 du présent numéro. ' Ibidem, p. 53 du présent numéro.

' Lettre d'août 18 71, publiée par M. Paterne Berrichon dans le Mercure de France du 16 déc. 191 3, p. 730.

  • Lettre à Delahaye de mai 1873, P- 53 du présent numéro.

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