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Page:NRF 12.djvu/186

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l8o LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

se repose un instant, de minuscules sangsues se promènent.

Sur le mur blanc de la mosquée s'agite Tombre d'un platane. A la manière de Sienne, mais selon un tout autre esprit, un arceau simple et presque sans relief sur- monte et fiance deux plus jeunes arceaux. Dans le retrait du relief, les nids d'un peuple d'hirondelles. A mes pieds le vert Sahel de Brousse, où s'étend la paix lumineuse. Il fait tranquille. L'air est inefiàblement limpide ; le ciel, clair comme ma pensée.

Ah ! ah ! recommencer à neuf, et sur de nouveaux frais ! Eprouver avec ravissement cette tendresse exquise des cellules oii filtre l'émotion comme un lait... Brousse aux épais jardins, rose de pureté, rose indolente à l'ombre des platanes, se peut-il que ne t'ait point connue ma jeunesse ? Déjà ? Est-ce un souvenir que j'habite ? Est-ce bien moi qui suis assis dans cette petite cour de mosquée, moi qui respire, et moi qui t'aime ? ou rêvé-je seulement de t'aimer ?.. Si bien réellement j'étais, aurait-elle volé si près de moi, cette hirondelle ?

Dimanche. Brousse.

Dès que j'aime un pays, c'est pour souhaiter d'y vivre. Mais ici je ne ferais point d'amis. Ma solitude ne s'appa- rente qu'aux arbres, qu'au bruit des eaux courantes, qu'aux ombres que tressent les treilles au dessus des rues du marché. Le peuple est laid ; c'est l'écume que les civili- sations ont laissée.

Cinq petits juifs nous accompagnent aujourd'hui de la Mosquée Verte jusqu'au bazar et à l'hôtel. Chacun d'eux semble de race différente, et de deux seulement on

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