686 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE
qu'aucun prestige ne l'égarât, pauvre âme, pour que son chemin fût sûr.
Pour que ce qui était à vous seul vous fût entièrement conservé.
C'est pour cela sans doute que mes yeux furent clos.
Et maintenant que je vous ai retrouvé, eh quoi, tu me veux donc écouter ?
— Pourquoi m'avoir répudiée ? qu'ai-je fait ? pour- quoi m' avoir donnée ainsi cruellement à un autre ?
ORIAN. — Paroles que j'ai entendues en rêve souvent.
PENSÉE. — Elles ne sont que trop vraies.
ORIAN. — Qu'importe le passé ? Je vois votre visage, je prends votre main dans la mienne, et si je vous demandais de vous embrasser, sans doute que vous me laisseriez faire.
Que demander de plus ? Se voir, se toucher, parler, entendre l'autre qui parle,
(Le peu de temps nécessaire pour comprendre qu'on n'a plus rien à se dire).
Il parait que cela suffit pour être présent l'un à l'autre.
PENSÉE. — Je le sais cependant, oui, en dépit de tous vos raisonnements, vous ne me ferez pas croire le contraire.
Il y a quelque chose en vous qui se réjouit que je sois avec vous en ce moment, — de la manière que je puis.
ORIAN. — Dans un instant je vous aurai quittée.
PENSÉE. — Est-ce qu'il est si facile de s'en aller quand je suis là ?
ORIAN. — Non, je ne le sens que][trop,' Pensée.
PENSÉE. — Tu ne me quitteras pas avatnt de m'avoir entendue. Toutes ces paroles que j'ai préparées et mise» ensemble,
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