798 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE
dernière heure de Catherine n'a pas été « aussi paisible que celle de François d'Assise »? « Au moment suprême, des doutes l'assaillirent, l'avocat du diable que devient la cons- cience, quand la lumière du monde de la vérité commence à luire dans l'âme... lui souffla que l'œuvre de sa vie entière n'avait été inspirée que par l'obstination et parla vanité... » Hélas ! l'homme d'action court plus de risques d'erreur que l'homme de pure prière. Mais oublie-t-on de quoi Cathe- rine payait la haute régence spirituelle qu'elle exerçait à juste titre sur son temps ? de quel oubli, de quel mépris, de quelle persécution volontaire de sa personne ? Dans la grande détresse de sa patrie, ravagée de vice et de haine, qui accusait-elle d'abord ? Elle-même. « Il lui semblait qu'elle était cause de tout le mal qui se déchaînait sur le monde, car si, en telle ou telle circonstance, elle eût agi différemment, ceci ou cela ne se serait point produit et les événements eussent pris une tout autre tournure... C'est sous l'empire de ce sentiment qu'elle s'abîmait toujours dans la prière en s'exclamant : « Peccavi, Domine miserere mei. » Et comment n'eût-elle pas tout réclamé des autres, quand elle obtenait tout de soi ? Mais il faut la voir dans sa charité. « Je l'attendis donc au lieu de la justice (il s'agit d'un jeune condamné à mort, Niccolo Toddo, de Pérouse) en priant et en invo- quant sans cesse l'assistance de Marie et de Catherine vierge et martyre. Avant son arrivée je me baissais et je plaçais mon cou sur le billot, mais sans obtenir ce que je désirais et je priais et faisais violence au ciel et je disais : Maria ! Je voulais obtenir la grâce qu'elle lui procurât la lumière et la paix du cœur à ses derniers instants... Mon âme alors fut tellement enivrée de la douce promesse qui m'était faite, que je ne distinguai personne, bien qu'il y eût sur la place une grande multitude. » Ainsi tout cela, en public. « Il arriva enfin, comme un agneau paisible et en me voyant il se mit à sourire. Il voulut que je fisse sur lui le signe de la croix.
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