SAMUEL BUTLER 2^
Butler avait commencé un second livre. Il y reprenait le sujet de son opuscule sur la Résurrection, mais en le développant, et surtout en lui donnant une forme nouvelle. Il s'agissait, d'abord de déblayer le terrain pour faire place à sa théorie, et ensuite, d'exposer cette théorie. Donc, 1° il indiquerait les données de ce qu'on a appelé " le problème de Jésus ", du moins en ce qui concerne la Résurrection ; 2^ il montrerait comment les grands commenteurs anglicans avaient esquivé les difficultés réelles du problème ; 3^ il réfuterait la plus importante, — et, avant lui, la seule, — explication rationnelle de la Résurrection, la théorie dite des " hallucinations " de D. F. Strauss, et 4° il lui substituerait sa propre théorie, qu'on peut appeler de " la crucifixion incomplète ". D'autre part, comme il fallait — à cause du Rév. Thomas Butler — garder l'anonymat, il supposerait tout le livre écrit par un chrétien sincère, et comme une réfutation des théories rationalistes. D'où l'ironie du livre, si subtile, si parfaite — on songe aux Provinciales quelquefois, en le lisant — que beaucoup de gens s'y laissèrent prendre et qu'une publication religieuse, The Rock^ alla jus- qu'à en recommander la lecture aux fidèles. Tel est Le Havre de Paix (1873). Butler l'envoya à Darwin, qui lui écrivit : " J'ai été frappé de la force de vos arguments pour démontrer que Jésus n'est pas mort sur la croix, mais ils ne me paraissent pas tout à fait convaincants..." et plus loin il ajoutait : " Vous devriez écrire un roman." Ainsi Darwin lui donnait le même conseil que Miss Savage. C'est qu'en effet, une des meilleures parties du Havre de Paix est l'Introduction, dans laquelle on pré- sente l'auteur supposé du livre, sorte de Bouvard (ou de
�� �