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Page:NRF 14.djvu/317

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NOTES 311

vouloir porter à la scène et unir au moyen d'une action dramatique les divers morceaux qui composent les Goyescas. Non que ces morceaux ne se prêtassent à un élargissement sonore, mais parce que, concertée dans de telles conditions^ une intrigue risquait fort d'être ridicule. Disons-le tout de suite, le fil dont il s'est servi pour rattacher entre elles les fleurs de son bouquet est une assez grossière ficelle.

Il ne faut pas considérer les Goyescas comme un drame lyrique. Il faut oublier l'intrigue (cette rivalité auprès d'une grande dame d'un officier et d'un toréador et sa con- clusion sanglante par la mort de l'amant préféré) — et se contenter d'admirer trois tableaux auxquels la musique prête une âme.

Zuloaga, en un décor admirable de couleur et de caractère, a matérialisé pour nos sens la lumière et l'atmosphère des environs de Madrid. Sur les bords du Mançanarez se presse une foule joyeuse. Des femmes bernent un pantin comme dans l'estampe fameuse. On rit, on boit, on parle d'amour, on mange. Que nous importe ce que disent l'officier Fernando, son rival Paquiro, la belle Rosario et la jalouse Pepa ? Tout ce monde va et vient en scène avec une hberté, une siireté auxquelles les prédécesseurs de M. Jacques Rouché ne nous avaient point habitués. La musique s'épanche largement et sur ce flot viennent se poser les voix de la foule avec une aisance charmante. On ne peut analyser de trop près cette musique, il serait facile d'en signaler l'harmonie assez pauvre, les continuelles redites et surtout l'instrumentation rudimentaire, — (Mais est-elle vraiment de Granados cette orchestration ? La partition autographe n'a-t-elle pas coulé en mer avec J'auteur ?) — Il me suffit que les instru- ments, les voix de la foule et les personnages contribuent à donner la vie au merveilleux tableau que nous avons sous les yeux. Si Granados a conçu son œuvre en feuilletant les estampes de Goya, à leur tour les maquettes de Zuloaga et de Maxime Dcthomas ont permis de donner à son rêve une réalité plastique.

Puis, c'est un bal de faubourg. Sur un rythme sourd et

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