Page:NRF 15.djvu/199

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
shakespeare : antoine et cléopatre
193

drie un tribunal d'argent fut dressé. Antoine et Cléopâtre, assis sur des trônes d'or, à leurs pieds Césarion, fils illégitime, prétendaient-ils, de mon père le grand César, flanqué des deux bâtards, fruits de la débauche d'Antoine. C'est alors qu'il conféra solennellement à Cléopâtre le gouvernement de l'Egypte, et la proclama reine absolue de la basse Syrie, de Chypre et de la Lydie.

Mécène. — Et tout cela devant le peuple.

Octave. — En pleine place publique, vous dis-je ; il a proclamé ses fils rois des rois. La grande Médie, le royaume des Parthes et l'Arménie ont été dévolus à Alexandre ; et à Ptolémée la Syrie, la Cilicie, la Phénicie ; Cléopâtre apparut ce jour-là sous le costume de la déesse Isis, et déjà souvent, m'a-t-on dit, il lui était arrivé de donner audience dans cet accoutrement.

Mécène. — Il faut que Rome en soit instruite.

Agrippa. — Ecœurée déjà par l'insolence d'Antoine, il faut qu'elle lui retire son estime.

Octave. — Eh ! le peuple sait déjà tout cela. Il a reçu ses accusations.

Agrippa. — Mais qui le peuple accuse- t-il ?

Octave. — Moi. Il me reproche, ayant dépouillé Sextus Pompée de la Sicile, de ne point lui avoir donné sa part. Il dit m'avoir prêté des vaisseaux, et que je ne lui ai point rendus. Enfin il s'indigne que Lépide ait été déposé du triumvirat et que j'aie confisqué tous ses biens.

Agrippa. — Seigneur, il faut répondre à ces accusations.