388 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE
y avait tardé, c'est sans doute que dans le premier feu de sa fantaisie, la perspective d'un obstacle possible lui était insupportable. A la veille de passer des paroles aux actes, il tenait à mettre sa conscience en paix d'une façon défini- tive par l'obtention du suprême suffrage. Suffrage qui n'avait hélas ! aucune raison de ne pas lui être acquis, personne au monde ne pouvant contester son droit absolu de procéder chez soi comme il l'entendait. Mon oncle était encore plus que lui féru des principes. Il était toute- fois certain que si son frère émettait par hasard l'ombre d'un blâme, les maudits arbres ne seraient jamais plantés.
Nous laissâmes donc maman et Marguerite empaqueter de blanc rideaux, glaces, meubles et jusqu'aux moindres objets ; et nous nous acheminâmes vers Mauvent. Ciel voilé, brise légère, on eût difficilement choisi journée plus favorable pour cette expédition.
La propriété de mon oncle doit son nom à son exposi- tion très éventée. Elle est sise sur le même versant que Longval, à l'extrémité du coteau dont la ligne, rompue par un coude brusque de la Sienne, s'en va reprendre un peu plus loin sur la rive opposée. Les toitures groupées et inégales de Mauvent, le pignon, surmonté d'une croix, de sa chapelle, la coupole blanche de son observatoire, sont visibles de tout le pays environnant, et l'on croirait bien plutôt d'un hameau que d'une habitation particulière.
Nous gagnâmes Saint-Clair et la route, qui, au sortir du village dont elle forme la principale rue, longe la crête du coteau. Une ligne presque ininterrompue de murs cache malheureusement la vue du côté où M. Davè- zieux l'apprécie tant, mais, sur la gauche, les échappées ne manquent point. Toute cette région, accidentée et fort
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