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522 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

à penser que certaines théories de l'autorité, qu'elles soient réduites au service du parti royaliste ou du parti jacobin, découlent d'une même utopie : l'unification par la force. Ou même plus simplement : l'unification.

Or voici ce que Balzac imagine : En 1786, M. de Calonne, Beaumarchais, et quelques autres convives sont réunis à la table de M. Bodard de Saint- James, trésorier de la marine. La présence de deux inconnus d'assez vilain aspect les étonne. On apprend à la fin du récit que l'un d'eux se nomme Marat ; l'autre est M. de Robespierre. Ce dernier, vers la fin du dîner, raconte un rêve qu'il a fait. Marat sitôt après raconte également un rêve ; et ces deux rêves se complètent ; le second n'est que la suite, la conséquence du premier ; il représente sa mise en œuvre.

Catherine de Médicis est apparue à Robespierre, et le rêve de celui-ci n'est à proprement dire que le discours qu'elle lui tient. L'on sent, en lisant cette hardie profession de foi politique dont elle instruit Robespierre, que Balzac tout à la fois l'admire, et qu'il en pressent le danger. Il se défend de la donner pour sienne, et la pré- sente artificieusement. C'est-à-dire qu'il la donnerait pour sienne si jamais elle pouvait réusir. Mais aussi bien sait-il qu'elle ne peut jamais réussir...

Que Balzac ait voulu écrire là son Dialogue de Sylla et d'Eucrate, je le crois volontiers. Je citerai quelques pas- sages de cet admirable discours où, par places, il atteint à une insolite beauté.

— Ah ! Madame, commence Robespierre, vous avez commis un bien grand crime. — Lequel ? demanda-t-elle d'une voix grave. — Celui dont le signal fut donné par la cloche du

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