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SUR LA TERRASSE DE LECTOURE

point précis de maturation où je pouvais la goûter avec le plus de fruit. Elle semble faite du même grain dur et serré que la colline où elle est bâtie, et son histoire, ses pierres, sa cathédrale, ses mœurs, nous la montrent participant de la volonté inexpugnable avec laquelle elle continue son calcaire natal. Sans cesse roidie et, en quelque sorte, dardée dans une attitude de résistance, lorsque sa pointe s’émousse, ce n’est pourtant pas pour déchoir, mais pour se renfermer dans un grave repos et nous offrir une figure de dimensions réduites, mais complètes, proportionnée exactement à l’échelle française.

Rien, à Lectoure, n’agit qu’en vue de l’ordre et de la hiérarchie ; tout y est commandé, tout y est discipline réciproque, force protectrice, servitude volontaire. La molle fertilité des champs elle-même semble se plier avec une résignation riante à l’âpre vœu de la ville qu’elle est chargée de nourrir. Servir ! servir ! semblent exprimer par leur agenouillement, par leurs inflexions touchantes, ces prairies, ces collines qui ondulent, détaillent, se relèvent en pentes douces jusqu’au pied des murailles à jamais contractées pour leur défense et leur conservation. Quelles litanies ne pourrait-on pas composer à la célébration de cette petite place forte, toujours tendue à la guerre, non point pour détruire ni s’agrandir, mais pour s’exercer toujours à la défense et acquérir de la gloire par