A vouloir commenter ce livre, on risque de prouver surtout que pour l’avoir trop compris on l’a
mal deviné, tant on sent qu’il se veut irréductible
à l’entendement. Ce serait là sans doute un truisme
s’il s’agissait d’une pure œuvre d’art. Mais précisément chez cet authentique poète qu’est Rilke,
le plus original peut-être et l’un des plus richement
doués parmi les Allemands de sa génération, la
pente de l’esprit, l’inclinaison morale est si forte
qu’elle détermine la vision, de telle sorte qu’on
lui ferait tort d’une part essentielle en ne se préoccupant point de la signification de ses écrits.
Les deux petits volumes de prose dont il est question révèlent pleinement une richesse secrète, un sens d’intimité que les œuvres précédentes ne décelaient encore que par affleurements. Dans ce recueil de souvenirs et d’impressions, qui tient autant d’un traité de la vie intérieure que d’une étude de psychologie, nous sommes d’abord frap-