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Page:NRF 6.djvu/46

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Il serait heureux qu’il y eût quelqu’un pour comprendre de pareilles choses.

“De pareilles choses” occupaient maman quand elle était seule ; et elle était toujours seule, ces dernières années.

— Moi je n’y arriverai jamais, Malte, disait-elle parfois avec ce sourire bizarrement hardi, qui n’était souri pour personne mais trouvait contentement en lui-même. — Mais que personne ne cherche à tirer cela au clair !… Si j’étais homme, oui, si seulement j’étais homme, j’y réfléchirais, posément et avec méthode et depuis le commencement. Car il doit y avoir un commencement, et si seulement on pouvait le saisir, ce serait déjà là quelque chose. Ah ! Malte, nous passons, et tous sont distraits et affairés me semble-t-il, et ne font pas attention quand nous passons. Comme quand une étoile tombe et que personne ne la voit et que personne n’a fait un souhait. N’oublie jamais de souhaiter, Malte. Souhaiter, il ne faut y renoncer jamais. Je ne crois pas à l’accomplissement, mais il y a des désirs qui occupent longtemps, oui toute la vie, de sorte que l’accomplissement n’y trouverait tout de même pas sa place.

Maman avait fait monter le petit secrétaire d’Ingeborg dans sa chambre ; j’entrais à ma guise et souvent la trouvais assise devant. Mon pas s’étouffait complètement dans le tapis, mais elle sentait ma présence et me tendait une main par