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��LE THEATRE

HÉLÈNE DE Sparte de M. Emile Verhaeren (Théâtre du Châtelet).

Le poète des Flandres grasses, des usines, des ports et des rudes légendes populaires où semblent se mouvoir des person- nages de Breughel, Emile Verhaeren lui aussi se laisse, dans sa maturité, séduire par le mirage grec et par le nom d'Hélène. L'hommage qu'il y apporte n'est pas servile. Il ne vient pas quêter des thèmes de beauté. Ses propres ressources lui suffisent. Il possède cette puissance d'évocation et cette abondance lyrique qui le dispenseraient d'emprunter à l'antiquité des personnages tout dessinés, tout soulevés déjà d'ardeur poétique. Si donc il se tourne à son tour vers la famille des Atrides, ce n'est pas en poète érudit, en néo-classique ou en hellénisant ; c'est avec sa force et sa couleur personnelles, sans masque d'emprunt. Un Moréas pouvait sans se faire violence ni se manquer à lui-même, calquer son îphigénïe sur les anciens modèles et plier son inspiration à des nuances établies. Sa naissance, son goût, son effort, tout le portait depuis longtemps vers une telle oeuvre. Emile Verhaeren, lui, n'entrait pas de plain-pied dans la légende d'Argos et de Sparte. S'il aborde le Péloponnèse c'est en hardi pirate qui ne cherche pas à oublier la terre natale pour des climats plus voluptueux, mais qui hasarde une rapide incursion, regarde avec admiration les villes et les paysages, puis chargé de butin, reprend aussitôt la mer en chantant des chants du nord. Ce sont de telles équipées qui donnent bonne conscience au régionalisme. Et ego in Arcadia fui. Je songe à Maurice Barrés entreprenant le même voyage. Quels points de contact découvrir entre des esprits si différents ! L'un ne cesse

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