Aller au contenu

Page:NRF 7.djvu/158

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

152 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

que le bonnetier qui ait ces secrets-là dans sa boutique !

Mais, à cet appel d'une voix inconnue qui parle en vain dans le brouillard, rien ne répond que la bise glacée qui souffle, que le vent qui passe. Le bonnetier de Foë n'est pas là. Il est à la guerre des princes. Et, ceux qui rentrent dans le magasin n'ont à dépenser ni un souverain d'or ni un carolus d'argent. Quelque pauvre commis libraire de Pater- noster Row à l'habit élimé et aux bas troués, quel- que malheureux protestant français ayant fui devant les rigueurs de sa patrie, un greffier de la cour sans solde depuis le départ du roi Jacques, des religieux mendiants, des chétifs marchands, des femmes sans sou ni maille, voilà les maigres clients de l'humble magasin de Cripplegate.

De très loin, par les carreaux étroits piqués d'étoiles de givre et de fleurs de cristal, vous guettez ceux qui viennent, pauvre Suzanne de Foë ! Et ceux qui viennent ne sont ni bien riches ni bien gais ; ce sont d'humbles Anglais des basses classes. Parmi les femmes qui sont là, il y en a beaucoup qui, comme vous, ont des maris à la guerre...

Pendant que vos enfants gémissent, que la soupe du soir bout sur le maigre feu, malgré vos doigts gourds et vos yeux rougis, vous vous portez au-devant des pratiques, et, fouil- lant parmi les ballots, les tiroirs et les casiers

�� �