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Page:NRF 7.djvu/62

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56 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

Le souci de tout voir et l’habitude de la hâte lui infligeaient le tournis. Les révolutions inattendues de sa tête montraient soudain sa nuque aux gens occupés à lui parler en face ; cela nourrissait l’idée qu’il craignait le paiement sans avis de l’arriéré de coups de pied dans le cul dû à ses médisances.

Il obtenait de M. le commissaire de surveillance des certitudes et les notait, content lui aussi de cette idée simple, habituelle, que le mécanicien était entièrement responsable.

M. Bernard, caché, mais soigneux de rester pour l’occasion de se défendre montra à M. Legendre sa joie de se sentir tranquille. Contre cette paisible insolence, le tourmenté soulagea sa fureur :

— C’est vous qui nous avez foutus dedans. Si vous aviez enlevé les wagons lancés sur 5, la queue du 4922 n’aurait pas tenu l’aiguille 21.

M. Bernard mit en travers de ses lèvres masquées de moustache raide et grise, son index sale :

— Je les ai enlevés, aussitôt que j’ai pu… Vous n’êtes pas malin. Si on cherche pourquoi vous avez lancé des wagons sur 5 devant le 4922, on trouvera que la quatrième est raccourcie de 30 mètres par les modifications. On pourrait trouver aussi que cela vient de trop d’économie. Alors, le Conseil d’Administration serait responsable de l’accident ? J’ai 24 ans de service. J’en ai vu des coups de tampon ! Mettez-vous ça dans la tête : une enquête ne remonte jamais. La responsabilité se recherche au plus bas. On veut l’homme qui, le dernier, a touché à l’appareil sur lequel on a déraillé. Ou le mécanicien qui a passé le signal…