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JULIETTE LA JOLIE 809

Ce n'est pas ainsi que parlent d'habitude les pères de famille.

Quand la goutte fut " finie ", ils se levèrent à leur tour et respirèrent un moment sur le pas de la porte. Ils trouvaient que déjà la lampe donnait trop de chaleur. On voyait de la lumière dans presque toutes les maisons. Pourtant, de-ci, de-là, des portes, des fenêtres ouvertes faisaient dans les murs éclairés par la lune des trous noirs.

Devant la boutique de Thierry, le menuisier, c'était le groupe habituel de ces soirs : des hommes, des femmes et, comme on disait, de la gaminerie. On se répartissait, au hasard des arrivées ou des sympathies, sur les marches du perron. De plus, tout l'été, une planche — il en restait assez d'autres dans la boutique, — était installée à demeure.

Quel bon vivant que Thierry I II avait plus souvent en mains le fusil que la varlope, et passait plus de temps dans les bois qu'à son établi. De grand matin, à l'époque de la chasse, il partait avec ses deux chiens. Il avait l'habitude des chopines et des verres de marc que l'on vide sur des coins de tables, dans les auberges. Le reste du temps, il riait de tout comme Cougny. Gallois et Cougny se mêlèrent au groupe. Juliette s'assit un peu à l'écart, pas très loin du Louis Frébault qui venait d'arriver.

Il ne ressemblait ni à François ni aux jeunes gens qui ressemblent à François. Il allait avoir dix-sept ans et prenait beaucoup de livres à la bibliothèque de la mairie. L'idylle de Marius et de Cosette le faisait frissonner, il désespérait de jamais dire à Juliette d'aussi belles paroles ; il eût voulu pouvoir lui écrire et mettre tout son cœur avec le manuscrit sous ime pierre. Hélas ! La vie était

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