Page:NRF 7.djvu/816

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

8lO LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

impossible, sa mère le surveillait trop. Il ne pouvait venir à ces veillées d'été que lorsqu'ils n'étaient pas encore rentrés. Son pantalon, fait depuis trois ans et que sa mère se contentait de repriser, ne lui venait plus qu'à la cheville : il avait beau ne plus porter de bretelles. Il n'avait pas assez d'argent pour faire le jeune homme. Chaque dimanche il fallait qu'il accompagnât sa mère à la messe ; il tremblait que Juliette se moquât de lui et le prît pour un jeune homme pieux qui n'ose pas regarder les jeunes filles. N'avait-elle pas un peu de mépris pour lui parce qu'il ne vivait pas comme ceux de son âge? Qu'im- porte ! Ce soir il était bien content qu'elle fût venue s'asseoir près de lui. Elle lui semblait plus jolie à elle seule que toutes les autres jeunes filles. Ce n'était pourtant pas la première fois qu'ils se trouvaient ainsi l'un près de l'autre. Il se souvenait de trois ou quatre soirs semblables, où il faisait seulement un peu plus frais, qui les avaient réunis. Il n'osait pas se dire :

— Je crois que je ne lui déplais pas, puisqu'elle veut bien venir près de moi.

Elle n'avait qu'un signe à faire, pensait-il, pour que tous les jeunes gens du pays fussent à ses ordres. Jamais il n'aurait osé non plus lui parler de son amour. Leurs regards se portaient naturellement vers le ciel bleu au milieu duquel une étoile, plus belle, plus brillante que toutes les autres était comme Juliette parmi toutes les jeunes filles. Elle pensait à des romances où l'on parle de rêves et de baisers.

Ils se tutoyaient, ayant joué ensemble tout petits. Elle lui dit :

— Je t'ai entendu sifHer cette après-midi, mais comme

�� �