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JULIETTE LA JOLIE

porte de Juliette ! Et s'il savait que je me suis échappé ce soir à mes risques et périls !...

On poussait des cris de " Vive la République ! '*

— Et la mère République aussi ! cria ce farceur de Cougny. Elle ne dédaignait point, malgré son âge, de se mêler à ces bruyants cortèges, mais laissait chez elle sa trompe dorée.

— Tu n'as donc pas apporté ta musique, vieille ? lui dit Thierry qui était pourtant venu, lui, sans ses chiens. Tu aurais pu nous jouer un de tes airs favoris.

La fanfare attaquait une marche. Ils n'étaient guère plus d'une vingtaine d'exécutants parmi lesquels beaucoup de gamins de douze à quinze ans, mais ils y allaient de tout le souffle de leurs poumons. Les lueurs des torches fumeuses dansaient sur les murs des maisons. La route d'Avallon n'était pas très bien éclairée, mais à l'entrée de la grand'rue, à l'endroit que l'on appelle le Bout du Pavé, il faisait aussi clair qu'en plein jour. Sur des rebords de fenêtres, sur le trottoir, des feux de Ben- gale, de toutes couleurs, brûlaient. Des fusées montaient dans le ciel, vers les étoiles. Tout-à-coup il y eut un remous dans la foule, comme à l'endroit où un ruisseau se jette dans une rivière. C'étaient ceux du "canon " qui, les salves terminées, rejoignaient ceux de la retraite.

Le Louis, alors, aperçut Juliette, mais elle était avec le Paul qui fumait un gros cigare. Derrière elle venaient les deux familles au complet. Il se sentit saisi par un bras et giflé sur les deux joues, là, comme ça, devant — ou, plutôt, derrière — tout le monde. Heureusement. La fan- fare, qui s'était arrêtée, jouait une valse. Mais n'importe ! C'était sa mère, qu'il n'avait pas " dépistée ", qu'il avait

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