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Page:NRF 8.djvu/1066

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1058 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

caricature ne peut rien contre la belle image : elle la fait mieux connaître en quelques traits, loin d'y nuire.

D'abord, l'individu ; et puis, l'individu. Toutes les grandeurs, toutes les conquêtes en sont faites. Une religion solide porte toujours sur un dieu. Si la multitude est capable de grandes actions, c'est qu'elle est riche en individus. La cité, les lois, la morale, les écoles, toutes les formes du troupeau, toutes les garnitures du texte social, le prix en est incomparable, la contrainte nécessaire et l'utilité continuelle pour le troupeau : mais seulement pour lui. La race enfin n'est là que pour produire quelques individus, qui la renient aussi souvent qu'ils l'accomplissent. Telle est la condi- tion de toute générosité et de tout génie : n'être pas confondu dans la masse vivante, aller au delà, et ne s'en pas tenir à ce qu'on a reçu. Moins cette issue, il n'y aurait pas de rédemption pour l'espèce humaine. Nous ne vivons que pour faire notre salut : j'entends pour inventer l'homme. 11 n'est en nous que ce que nous sommes : mais ce que nous avons été, enfin, n'est pas tout ce que nous serons.

Le nombre des individus sera toujours petit. Bien peu d'hommes sont capables de vivre sous la loi de l'individu, qui est la plus sévère de toutes, consistant à se régler soi même et à servir une beauté supérieure, jusque dans le crime. Discipline

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