Il8 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE
entourée de ténèbres. Elle resta quelques instants, et sortit comme elle était entrée : sans cérémonies, sans que personne essayât de la retenir.
— Imaginez-vous, dit François, qu'il a presque fallu que je l'arrache de son fauteuil, et que je l'amène avec moi en la tenant par la main.
— Tu es donc malade ? demanda M"^' Nolot.
— Non, répondit Juliette. Je n'ai rien du tout. Mais il y a des jours comme ça où l'on se sent toute mal disposée.
Il ne fut pas question des Cougny.
— Eh bien, est-ce qu'on sort maintenant ? dit Léontine. Ils partirent tous les quatre. Ils passèrent devant la
boutique de M*"^ Garnier. Marguerite était assise dans le fond, toute seule, mais le Paul ne tourna point la tête de son côté : il était avec Juliette. Il n'y avait pas que son visage de changé : elle prononçait des mots d'argot. Elle marchait à côté de lui comme s'il n'eût pas été là. Il essaya de lui dire :
— Je me suis ennuyé tout le temps que je ne t'ai pas vue. Je me demandais si je t'avais fait quelque chose.
Mais elle fit comme si elle n'avait pas entendu. Il n'osa pas insister, de peur qu'elle prît la mouche. Il ne put prononcer devant elle le nom de Ponceau. Il tenait à croire qu'il ne s'était rien passé.
— Puisqu'elle est revenue, se disait-il, ce n'était qu'une lubie, François avait raison. Mais pour aujourd'hui il a beau dire : si elle n'avait pas voulu, ce n'est pas lui qui aurait pu la ramener à la maison.
Elle allait sur la route, son ombrelle fermée à la main, vite, comme si elle avait voulu être enfin seule pour
�� �