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CHRONIQUE DE CAERDAL I5I

lui met les mains sur la tête ; il lui parle à Toreille. Oui, ils ont pleuré ensemble.

Ils se disent : vous. Ils ont le ton le plus simple et le plus pur. La plus belle courtoisie, sans apprêt et sans hauteur. On les voit sourire, saint Louis au visage émacié et si blanc, Joinville large et haut, plein de feu et de sang, blond de poil, le teint fauve. En public, ils se comprennent à demi mot, et même du regard, l'œil riant. Il arrive au roi, si juste et si sévère, qu'il se serve de Joinville contre ses prélats et ses grands barons au conseil. 11 sait que Joinville sera toujours pour la justice, comme il l'entend lui-même. Et dans Joinville, il trouve toujours ce qu'il souhaite : le conseil de l'homme vrai et le trait de l'âme toute droite.

Saint Louis toujours avec son Dieu, Joinville toujours avec son Roi. Il le bien aime en tous ses gestes, en toutes ses pensées, en tous ses silences. C'est l'ami qui ne veut rien perdre de la présence préférée : il ne se lasse pas de saint Louis, que ses propres frères délaissent un peu bien souvent, n'étant pas à leur gré de compagnie assez gaie ni légère. Et saint Louis, il est vrai, si l'on joue aux dés, prend les tables de jeu et les jette à la mer avec les mises.

Le roi, " un chapel de coton en sa teste, " fait asseoir Joinville à son côté, comme son propre fils. Ils comparent l'étofFe de leurs surcots; ils la tâtent; et ils font réflexion, d'humeur enjouée, sur le luxe

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