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Page:NRF 8.djvu/229

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RÉFLEXIONS SUR LE ROMAN 223

Lorsque Renan, plus tard, à vrai dire, que Taine, toucha à la narration et à la fiction, il y réussit en maître. Comparez les Souvenirs à Etienne Mayran^ les Drames Philosophiques à Graindorge l C'est que Renan, avec un sens d'une merveilleuse finesse, usa de la fiction sans aller au devant d'elle, juste au moment de son chemin où elle s'offrait à lui comme un fruit à cueillir. Fiction ou souvenir, poésie et vérité : " Ce qu'on dit de soi, écrit-il, est toujours poésie. " Cette poésie venait sous sa plume d'historien et de critique aux heures où la vérité se dissolvait pour lui en nuances, et je pense bien que s'il s'était écouté, s'il ne s'était pas cru attaché, par un devoir professionnel, à ses monuments historiques, déserts et morts aujourd'hui, ainsi qu'à son Corpus^ il eût été très loin dans cette voie, eût conté, pour notre charme, bien d'autres histoires que celle du Broyeur de Un, bâti d'autre théâtre que ses quatre Drames. " La forme de Souvenirs m'a paru commode pour exprimer cer- taines nuances que mes autres écrits ne rendaient pas. " Et ses drames, ce sont des conversations, dit-il, entre les lobes de son cerveau... Cette voie de la fiction, qui est celle de Marius F Epicurien, de la Rôtisserie de la Reine Pédauque, du Jardin de Bérénice, d'En Marge des Fieux Livres, et où Renan est maître, voyez, sans que j'insiste, toutes les raisons qui la fermaient à Taine. Je crois qu'en somme il s'est bien jugé, et qu'en fait de roman

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