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86o LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

— C'est pas la peine, c'est moi qui l'ai ramassée, bougonna-t-elle en me fermant la porte sur la figure.

A quelques jours de là, ils partirent pour la mer. De- vant leurs volets fermés, je crus, bon naïf, que j'allais enfin goûter le repos d'une petite vie somnolente. Mais au bout de quarante huit heures, je n'y tenais plus ; je cherchais, du haut de mon grenier, un nouvel intérieur où plonger mes regards. Or, la cour est très grande, je ne peux examiner utilement que deux colonnes de fenêtres, et, aux étages inférieurs, habitent une vieille dame, un officier, une grue,... toutes gens qui ne sauraient m'inté- resser. Je réfléchis qu'à la campagne, on s'accointe plus aisément qu'à la ville, et le désir me mordit de rejoindre mes voisins sur leur plage. J'obtins de la concierge, sans attirer sa curiosité, l'indication de leur résidence, et quand je touchai à la semaine de congé que m'accorde la banque, je m'en fus auprès d'eux. Dans l'heure même de mon arrivée, je les rencontrai et les saluai comme de vieux amis. Les dames répondirent distraitement ; le père, étonné, se retourna pour chercher, — sur mon dos, sans doute, — qui je pouvais être. Encouragé, je m'approchai de lui, le soir, au casino, — en ai-je dépensé, de l'argent ! — et lui demandai de ses nouvelles.

— Très bien, merci, dit-il en portant la main à ses poches et en reculant d'un pas.

Il me prenait pour un pickpoket !

Horripilé par l'air marin qui m'ôtait tout sommeil, je conçus des projets fantastiques pour forcer l'indifférence de ces entêtés et m'ouvrir leur porte. J'imaginai l'aînée des filles se noyant et votre serviteur accouru à son se- cours, — je ne sais pas nager ! Je rêvai de grandes actions.

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