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Page:NRF 8.djvu/889

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CHRONIQUE DE CAERDAL 88 1

bien longues, à son propre génie : Corneille avait fini de donner tous ses chefs-d'œuvre, que Louis XIV n'était point né seulement, ou qu'il ne parlait pas encore.

Vous pensez voir un sage conseiller de Rouen, ou quelque avocat à la table de marbre, tout de noir vêtu, le rabat blanc sous le menton, mi de robe et mi d'Eglise. Il est familier avec les pères jésuites de la ville. 11 mène une vie simple, retirée, pieuse. Il élève des enfants avec soin. Il est plus souvent gêné qu'à son aise. Vous croyez peut-être que ce bon homme est tout chrétien ; et sans doute il croit l'être, bien humble, bon bourgeois, sujet tranquille qui sent sa province et sa rue de la Pie, un peu la basoche, un peu la soutane ; demi bègue, parlant un peu mal, se taisant le plus souvent en compagnie ; lisant d*une voix lourde et confuse, jusqu'à n'être pas capable de dire ses vers. Ores, levez un peu ce masque roide d'alexan- drins ; secouez ces vêtements noirs de robin sans faste et sans prestige.

Voici un homme affamé de puissance et de domination. C'est le plus fier républicain à l'an- tique : fier, c'est féroce ; et république, l'état idéal où règne la toute vertu.

Une âme folle d'absolu, et foUement indépen- dante ; ivre de soi, comme si elle était seule au monde ; rebelle à tout sentiment, et même à l'humanité ; docile uniquement aux devoirs qu'elle

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