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Page:Nadar - Quand j'étais photographe, 1900.djvu/223

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mières avenues l’immensité sans limites du domaine assuré désormais à la Photographie, la multitude des autres curieux se tassait comme abeilles au trou de ruche sur l’entrée d’un mystérieux petit cabinet noir où on ne pouvait pénétrer qu’un à un et où, fuyant la lumiére diurne pour un demi-jour factice, comme hiératique, le fameux perroquet de notre cher Becquerel prophétisait déja que la photographie aborderait victorieusement un jour la reproduction des couleurs. On se foulait devant les montres des exposants et en réalité on n’avait encore rien vu d’égal, — je n’hésiterai même pas à affirmer qu’on n’a depuis rien vu de supérieur aux grandes têtes d’expression du mime Debureau fils par Adrien Tournachon (encore un échappé de la peinture), — à un merveilleux portrait direct 30 X 40 de Frédérick Lemaitre, par Carjat, ample comme un Van Dyck, fouillé comme un Holbein, — à nombre d’autres encore parmi lesquels on ne saurait omettre les impeccables positifs sur verre de Warnod. — Mais quoi : Warnod était un esthéte éminent, écrivain de réelle valeur ; Carjat, de dessinateur industriel, s’était fait dessinateur portraitiste : l’œil qui a passé par ces éducations-là sait voir. On n’a pas oublié les qualités d’observation et de facture des nombreuses caricatures magistralement crayonnées par ce bon Carjat, — orateur en plus et même poète à ses heures par-dessus marché.