Aller au contenu

Page:Nadar - Quand j'étais photographe, 1900.djvu/275

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ché ; enfin, mon tentateur apparaissait là tellement sûr de son affaire, de notre affaire.

Mais cette fois, ne nous emballons pas trop vite ! D’ici je les entends déjà gronder — (elles s’inquiètent de rien !) — et me crier que ce n’est plus de mon âge, les aventures — (comme si j’avais besoin d’elles pour me le rappeler, hélas !) — Et tout à point encore je me remémore les légendes de tant de gens mis à mal, au plus mal, en vérité, par ces bestioles-là : pas plus tard qu’avant-hier, dans le journal, l’histoire de ce voiturier assailli, qui ne s’en releva pas…

Et sans aller plus loin, comment ne me reviendrait-il pas à l’esprit celui que nous avions appelé le Monstre, — vous savez, mon voisin de campagne, cet animal de propriétaire si antipathique, tellement ladre qu’il poussait, à écouter Karr, l’avarice jusqu’à la prodigalité, — celui-là qui avait fait installer dans son jardin une ruche « pour utiliser » ses fleurs. Aussi les abeilles, ces braves petites vengeresses, l’eussent plutôt dévoré tout cru que lui permettre de se présenter dans ses propres allées autrement qu’enveloppé de gaze verte de la tête aux pieds, comme les baromètres des mairies de campagne. — Ce même « Monstre » que je vois, que j’entends encore, me criant un matin par-dessus notre treillage, en levant ses bras voilés de gaze vers le Ciel, dont les Monstres ne revendiquent pas moins leur