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Page:Nadar - Quand j'étais photographe, 1900.djvu/294

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habillé en sauvage de la Courtille, maillot chair, plumes multicolores en tête et en ceinture, tape furieusement sur une série de caisses graduées ; là, quatre pauvres diables, aveugles ou pseudo, raclent ou soufflent des airs peu variés. Chacune de ces deux caves a son public enthousiaste. Ces divertissements comptent en tête des distractions parisiennes. — A propos de musique, un chef d’orchestre vient d’imaginer un instrument dont on raffole : le cornet à pistons. — En face du Palais de justice, nouvelle petite place où nous irons bientôt sauter dans la salle du Prado d’hiver, et qui sera plus tard notre boulevard du Palais, une fois par semaine, le jeudi, se dresse à dix pieds environ de hauteur un échafaud grossièrement équarri, avec des poteaux plantés sur la plate-forme. La bonne, un peu hasardeuse, me fait un jour passer par là et par la foule opaque je parviens à entrevoir trois hommes et une femme, en bras, comme on dit, de chemise, liés à ces poteaux : ce sont les condamnés à « l’exposition » et à « la marque. » Ils échangent à tout gosier d’ignobles lazzis avec la foule. Sur le plateau, deux autres hommes, libres de liens, ceux-là, tenant l’un un réchaud de charbon flamboyant sur lequel deux outils mystérieux, à manche de bois, l’autre un seau où flotte une grosse éponge dans l’eau vinaigrée. Ça, c’est pour la marque : TF, travaux forcés à temps, TP, à perpétuité. L’un des deux hommes découvre brusque-