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Page:Nadar - Quand j'étais photographe, 1900.djvu/32

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quand j’étais photographe

que la portée de notre main, à toutes distances, — burinant, décapant, dorant, argentant, — nous tâtant le pouls et réglant notre montre, — appelant les pompiers avant que nous ayons vu le feu et les terrassiers avant la crue de l’étiage, — combattant à notre place soit en veillant comme sentinelle, soit en nous précisant la vitesse de nos projectiles ou en faisant sauter les forts ennemis, — indiquant au chirurgien la balle dans notre corps perdue, — arrêtant net nos chevaux lancés ou nos locomotives, et arrêtant aussi les voleurs, — labourant notre sol, blutant notre blé, bonifiant et vieillissant notre vin, nous abattant le gibier, contrôlant nos caissiers en même temps qu’il garde nos caisses, — et empêchant même nos bons députés de tricher dans leurs votes en attendant que nous en obtenions la machine bénie qui nous fabriquera enfin des représentants qui ne nous fraudent en rien ; — ouvrier de premier ordre en tous arts et métiers et bon à tout faire, tour à tour ou simultanément comme on veut, fort de la Halle, facteur, lampiste, graveur, laboureur, médecin, artilleur, comptable, archiviste, scieur de long, remplaçant militaire, ténor et sergent de ville…

Au fait, pourquoi pas photographe, ce Maitre Jacques universel, — et même photographe à distance ?

Et le bon Hérald, né pour être à jamais croyant,