Aller au contenu

Page:Nadar - Quand j'étais photographe, 1900.djvu/48

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
40
quand j’étais photographe

de toujours revenir depuis la sublime et décevante découverte des Montgolfier ; il fallait donc, comme l’homœpathie vis-à-vis des allopathes, renverser la proposition pour dégager le problème et le poser enfin dans son véritable terme, absolu, exclusif :

Être plus dense — plus lourd que l’air — pour commander à l’air — c’est-à-dire comme partout, en toutes choses : — Être le plus fort pour ne pas être battu.

    vite, profitant en toute hâte de l’embellie d’une accalmie de quelques minutes, c’est-à-dire remportant la victoire sur l’ennemi absent ?

    Ce fut alors que, pour la confusion de notre pays et de l’intellect humain, un Ministre de l’Instruction ou plutôt de l’Ignorance publique osa proférer en plein Institut — (Babinet étant mort, Barral hors mis et Marey pas encore) — ces paroles qui demeurent, scandaleuses, en péroraison de son rapport :

    « Gloire à l’armée française qui vient de découvir la direction des ballons !… »

    Assurément, — et qui y contredirait ? — assurément sur cette découverte l plus extraordinaire comme la plus féconde des trouvailles humaines, jamais le prédestiné, l’admirable inventeur ne se fût lassé d’affirmer et réaffirmer encore la gloire de sa conquête, de réduire à néant toute incrédulité, tout doute, par une succession continue de voyages aériens, quotidiennement accomplis, avec jours, heures et itinéraires d’aller et retour annoncés, proclamés à l’avance.

    Or combien de fois, depuis l’affirmation si solennelle du ministre H. M., l’École de Meudon a-t-elle renouvelé seulement son saut de puce sur Chaville et retour ?

    — Et combien depuis tant d’années successives a coûté, combien coûte encore chaque année à notre budget déjà si lourd l’élève stérile de ces « poissons volants » — qui ne volent pas et qui ne sauraient voler jamais ?