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Page:Nadar - Quand j'étais photographe, 1900.djvu/71

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Les yeux dans les yeux de son aîné, le frère n’attend qu’un signe, — le bras levé pour frapper…

N’oublions pas, pour bien comprendre et tout comprendre, que ce trio vengeur, d’une réalité autrement dramatique en son parfait accord que celui de Don Juan, nous vient tout droit de la zone sinistre dont les départements sont teintés au maximum du noir sur les cartes criminalistes comme sur celles de l’instruction publique. C’est le pays où l’on égorge au son de l’orgue nasillard le vieillard entraîné, le pays de la veuve Bancal et de Bastide-le-Gigantesque, où les roches rendent à jamais l’écho de la complainte de « Fualdès ». Dans cette région nativement, naïvement scélérate, le soleil qui enivre comme un vin épais dégage des buées qui sentent le sang. La morsure de la vipère y est plus mortelle ; la plante aux couleurs exaspérées, napels ou digitales, y suinte des poisons plus âcres, plus subtils. La crécelle de la cigale s’obstine pour couvrir le pas de l’homicide, et, des Pyrénées aux Abruzzes, le couteau semble naturellement pousser par les doigts, comme pour allonger et parfaire la main qui tue…

En bonne justice où tout se compte, ceci ne saura être à son heure oublié.