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Page:Nadar - Quand j'étais photographe, 1900.djvu/72

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Enfin, tout est disposé, dressé, prêt. — Cet homme qui, la veille, ne savait trouver seulement de quoi payer un morceau de pain ou un port de lettre, immédiatement il a inventé tout ce qu’il lui faut pour louer une maison isolée près de Paris, à Croissy, au bout du pont, et encore de quoi solder tous frais de voyage et autres, de telle sorte que l’exécution prononcée ne puisse être une seconde arrêtée ou gênée par quelque misérable question de détail.

Sous sa dictée, c’est la femme, — la femme elle-même — qui va écrire pour indiquer un dernier rendez-vous à l’amant félon… Stupéfiée, stupide comme l’outil à l’ordre de l’époux devenu d’un coup formidable devant le forfait à accomplir, et, sans même songer à se rappeler qu’elle aussi a à venger sa vie perdue, les hontes et les remords de sa double trahison à son tour trahie, elle obéit, et, jusqu’au delà de l’horrible, elle obéira : — comme une prédestinée de la fatalité antique, c’est elle, — la sœur de l’autre sœur, ne l’oubliez pas ! la sœur de la folle, — qui va conduire là-bas, jusque sous le couteau, l’homme qu’elle a aimé…

Mais, ce soir-là, c’est vainement qu’elle l’attendra à la gare Saint-Lazare, — et c’est vainement aussi que les deux autres l’attendront là-bas, dans la petite