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Page:Nanteuil, L’épave mystérieuse, 1891.djvu/237

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quelques mètres à peine séparaient l’aviso de cette dernière, à laquelle des cordes furent adroitement lancées. Abandonnant leur baleinière, les hommes saisirent les amarres et tous se hissèrent à bord, les officiers après les matelots. Alors un boulet arriva du fort Alexandre, mais sans atteindre le Roland en train de virer. Tiré du fort Constantin, un second boulet brisa seulement le beaupré de l’aviso, qui était à l’abri du promontoire, lorsqu’une formidable décharge alla se perdre derrière lui.

Pendant que son bateau rejoignait l’escadre, le commandant interrogea Ferdinand, le plus ancien en grade des deux officiers revenus de cette expédition.

« Commandant, répondit l’enseigne, nous sommes arrivés sans encombre auprès des vaisseaux coulés, dont hier matin on avait déjà relevé la position. Sept bâtiments sont là et leurs carcasses encombrent l’entrée du port ; il reste passage pour un seul, encore faudra-t-il que celui-là, s’il n’est pas à vapeur, navigue en zigzag. Les zigzags continuent jusqu’aux bassins intérieurs de l’arsenal.

— Comment le savez-vous, Résort ?

— Parce que, voyant la place libre, et approuvé par Lartic, j’ai fait pousser jusqu’au milieu de la passe.

— Et là ?

— Là le soleil parut et on nous arraisonna, et, comme je ne sus pas répondre en russe, l’éveil fut promptement donné. Aux premiers instants, on avait peut-être confondu la nôtre avec une embarcation de l’escadre coulée.

— Et qui tira sur vous ?

— Le fort de gauche. Débouchant ensuite du fond de l’arsenal, une grande chaloupe prit la chasse.

— Vous ne fûtes pas tentés de vous servir de vos revolvers ?

— Non, vraiment, nous nous rappelions la défense faite à ce sujet.

— Eh bien, vous avez parfaitement et heureusement rempli cette mission, dont je vais rendre compte à l’amiral Hamelin… »

… En rentrant à bord, le commandant annonça la détermination prise par les amiraux de chercher sur les côtes sud et sud-ouest de la Crimée deux ou trois bons mouillages où leurs escadres fussent à l’abri.

« Et, ajouta le commandant de la Roncière, l’amiral Dundas et les Anglais ont jeté leur dévolu sur Balaklava, dont ils connaissent la position ; mais, s’ils croient se trouver là plus commodément que nous, ils se trompent fort, car, après m’être renseigné auprès d’un capitaine marchand, je fonde, moi, les plus grandes espérances