Page:Narrache - Jean Narrache chez le diable.djvu/90

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— « Tu te rappelles ? Tu es entré, un bon après-midi, dans mon bureau avec, sous le bras, le dernier exemplaire du journal américain PM. »

— « Ah, oui. C’était là que je puisais mes nouvelles. »

— « Tout juste. Et moi, j’ignorais même l’existence de ce journal-là. Tu m’as même laissé ton exemplaire, en me disant que tu t’en procurerais un autre au kiosque voisin. »

— « Je te devais bien au moins cela. Et puis, ce jour-là, comme bien d’autres fois, tu m’as offert un de tes cigares. »

— « C’est vrai ! Je fumais le cigare, depuis que je me croyais en train de faire fortune à la radio. Alors, tu n’as pas oublié mes cigares ? »

— « Les oublier ? Chose impossible ! Tes cigares, ils étaient infects, Louis ; je te l’avoue maintenant. Tes cigares ! De véritables Flor de el Puente ! Mais tu me les offrais avec un si grand cœur que je ne me sentais pas le courage de les refuser. »

— « Petit pendard, c’est ça, ta reconnaissance ! »

Francœur éclata de rire et, en me fixant de ses gros yeux de hibou, derrière ses énormes lunettes, ajouta : « Eh bien, moi, aussi, je les trouvais abominables. Mais, je m’en étais fait « coller » deux cents par un marchand et il fallait bien que je les écoule !! »

Peu à peu, en déroulant le fil de nos souvenirs, Francœur évoqua les soirs où chacun de nous faisait des commentaires plutôt violents sur le maréchal Pétain. Nous recevions des appels téléphoniques de protestations et de menaces. On