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Page:Necker - Hommage de M. Necker a la nation françoise - 1789.pdf/6

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gangrenés de tous les vices, oſaient méditer contre eux !

Cependant la contrainte dont on m’avait fait une loi, en exigeant que je renfermaſſe au-dedans de moi-même, l’expreſſion de ma juſte douleur, ſemblait en avoir rendu le foyer plus ardent ; un preſſentiment ſecrêt, qui ramenait, ſans ceſſe, mes eſprits troublés aux lieux que je quittais, ne me laiſſait pas même jouir du calme de ma conſcience ; j’arrivai ainſi, ſans m’en appercevoir, à Bruxelles, où il ne fallut rien moins que les ſecouſſes violentes des nouveaux chagrins que j’y éprouvai, pour me rappeller au ſentiment de ma funeſte exiſtence.

Ce fut-là, ô chers concitoyens ! que mes yeux furent entièrement deſſillés ſur les damnables & extravagans myſtères d’une cabale odieuſe. L’hôtel où je deſcendis, fréquenté par un grand nombre d’étrangers, retentiſſait déjà des exploits inhumains d’une troupe de ſoldats forcenés, conduits par la fureur délirante d’un chef infâme, juſqu’au grand baſſin du jardin-royal des Thuilleries. Cette nouvelle inattendue, ſurchargée des détails ſiniſtres qui groſſiſſent toujours les événemens de ce genre, en raiſon de la diſtance