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MONROSE


quelques heures par jour, l’ayant mise tout de bon dans le goût des grandeurs, il lui prit un beau matin fantaisie d’épouser certain vieux sardanapale de baron, qui, n’ayant plus un écu, prostituait depuis quelques années, sur le pavé de Strasbourg, un nom qu’on dit honnête, et de ces décorations dont l’Allemagne est volontiers prodigue. Ainsi métamorphosée, et le vil baron duement confiné dans un coin de l’Alsace, sous peine de n’être point payé des quartiers d’une pension modique, prix de son déshonneur, madame la baronne vint s’établir à Paris, où, par bonheur, elle était peu connue. Bientôt on la vit partout, faisant sonner très-haut son titre et son rauque nom, qui m’était toujours échappé, mais que vous m’avez enfin rappelé à force de le redire. N’est-ce pas qu’à table vous aviez vu cette fanfaronne étaler fastueusement une grosse boîte d’or dont le dessus offrait un large portrait ? — Je vis la boîte, et j’y admirai son excellence le haut et puissant baron, bardé de ses cordons comme le vénérable d’une loge. Mais comment soupçonner son épouse de ne pas le valoir au moins pour la qualité ! Son air de cour ! le respect du plénipotentiaire et presque du grand-chanoine pour elle ! — Oui : du premier, par bassesse ; et du second, par esprit de