Page:Nerval - Élégies nationales et Satires politiques, 1827.djvu/119

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Mais apprends que les vers peuvent avoir leur prix,
C’est par-là qu’on est grand dans de petits écrits,
Qu’on vit dans l’avenir, et qu’un sage ministre
N’est pas, après sa mort, oublié comme un cuistre.

L’homme s’illustre en vain, si la postérité
Ne lit en de beaux vers son immortalité ;
Sans Homère, a-t-on dit, qui connaîtrait Achille ?
Baour, depuis long-temps, a bien changé de style,
Mais qui saurait sans lui, dans des siècles nouveaux,
Que Bonaparte fut, et qu’il fut un héros ?

Ta splendeur, je l’avoue, est plus durable encore,
Ô toi dont le déclin tarde à suivre l’aurore,
Où pourras-tu trouver un Baour pour chanter
Le succès des grands coups que tu sais méditer,
Qui t’ait vu, te connaisse, et dise qu’il t’admire,
Ou sans rire soi-même, ou sans prêter à rire ?

Sauf ces deux clauses-là, tu pourras à Paris
Trouver des vers flatteurs cotés à très-bas prix ;
Dans ce vaste comptoir de toute renommée,
On peut, au poids de l’or, trouver de la fumée ;
Au lieu d’un vil métal, que d’honneur t’est offert !
Si tu veux qu’on t’appelle un Turgot, un Colbert,
Ne te consume point en bienfaits inutiles ;