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ANGÉLIQUE

parce qu’il était impossible de marcher ni de parler dans ma chambre que mon papa ne l’entendît. J’eus beaucoup de peine à le faire sortir. »

L’amoureux, un peu confus, retourna à Paris. Mais, à son retour, l’affection mutuelle s’était encore augmentée ; — et les parents en avaient quelque soupçon vague. — La Corbinière se cacha sous un grand tapis de Turquie recouvrant une table, un jour que la demoiselle était couchée dans la chambre dite du Roi, « et vint se mettre près d’elle. » Cinquante fois elle le supplia, craignant toujours de voir son père entrer. — Du reste, même endormis l’un près de l’autre, leurs caresses étaient pures…

5e LETTRE

Suite de l’histoire de la grand’tante de l’abbé de Bucquoy.

C’était l’esprit du temps, — où la lecture des poètes italiens faisait régner encore, dans les provinces surtout, un platonisme digne de celui de Pétrarque. On voit des traces de ce genre d’esprit dans le style de la belle pénitente à qui nous devons ces confessions.


Cependant, le jour étant venu, La Corbinière sortit un peu tard par la grande salle. Le comte, qui s’était levé de bonne heure, l’aperçut, sans pouvoir être sûr au juste qu’il sortît de chez sa fille, mais le soupçonnant très-fort.

« Ce pourquoi, ajoute la demoiselle, mon très-cher papa resta ce jour-là très-mélancolique et ne faisait autre que de parler avec maman; pourtant l’on ne me dit rien du tout. »