Page:Nerval - Lorely, 1852.djvu/309

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nuit d’un bal où les belles Liégeoises déployaient leurs séductions dans un but patriotique, tous les ouvriers de la ville réunis parvinrent à démolir le fort de fond en comble, de sorte que les soldats, en y retournant au point du jour, trouvèrent la montagne nue comme la main. Le fort actuel défie toute tentative pareille ; il faudrait non pas le démolir, mais le combler.

Il est une heure, et je me hâte de descendre vers la ville, suffisamment averti que plus tard il serait impossible d’y dîner convenablement. Les tables d’hôte sont d’ailleurs excellentes ; le vin ordinaire coûte trois francs la bouteille comme dans toute la Belgique ; quant à la bière, à Liége, elle cesse d’être forte ; c’est une bière brune qui ressemble à nos bières de Lyon. Le faro, le lambick, la bière même de Louvain sont considérés là comme des boissons étrangères. Quant au pain, on l’a dit fort justement, il n’y en a pas, et là se trouve réalisé le vœu de cette princesse qui disait : « Si le peuple n’a pas de pain, il faut lui donner du gâteau. »

Je me remets à dévider l’écheveau fort embrouillé des vieilles rues de la ville. C’est l’occupation la la plus amusante que puisse souhaiter un voyageur, et je plains sincèrement ceux qui se font conduire aux endroits curieux. Dans toute ville, les trois centres importants sont l’hôtel de ville, la cathédrale et le théâtre. Chacun de ces quartiers a,