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Page:Nettement - Études critiques sur le feuilleton-roman, 1re série, 1847.djvu/60

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42 liMRODUCTION.

scélérat qui a érigé l’assassinat en système, et qui se déclare négociant es meurtre, devant un public qui l’entoure de sa curiosité, presque de sa sympathie ; des âmes sensibles s’apitoient sur son sort, et les paniers de vin de Champagne arrivent au cachot de Lacenaire pour l’aider à passer gaiement les derniers moments de son agonie sans remords. Tantôt, c’est une empoisonneuse dont la perversité romantique séduit les imaginations et tourne les têtes. Pendant plus de deux mois, M"""^ Lafarge, la triste héroïne du Glandier, règne, du banc des accusés, sur l’attention publique comme du haut d’un trône ; et quand le jury a prononcé, quand la justice a déclaré la culpabilité de la moderne Brinvilliers, elle se console en écrivant ses mémoires et en les dédiant à ses amis, comme un ministre disgracié occupe les heures de sa retraite à raconter les actes de son ministère à la postérité. D’autres l’ois c’est une bande tout entière de voleurs qui, après les plus audacieux méfaits, semblent moins préoccupés du sort qui les attend, que de l’eiTet qu’ils produisent. Comme l’a dit un moraliste d’un esprit élevé, (1) « Il y a de beaux « crimes, des infamies dramatiques, l’assassin pose, et « le beau monde applaudit ; le malfaiteur a son jour « de Capitole, et il chante un hymne qui ne semble pas « près de tinir. » La cour d’assises devient un cirque, et l’empoisonneur et l’assassin ne sont plus que des gladiateurs préoccupés du soin de mourir avec grâce et de manière à obtenir le suflra^e des dames romaines assises sur les gradins de ramphilhéâlre. (1) M. Louis Reybaud, Etudes sur les réformateurs.