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Page:Niboyet - Le vrai livre des femmes, 1863.djvu/18

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tionnent : de l’autre, c’est la famille ; sanctuaire au sein duquel chaque femme doit naître, vivre et mourir ! L’enfance, comme la plante, porte sa fleur avant son fruit ; quels services les petites filles, dans les classes inférieures, rendent à leurs mères, à un âge où, riches, elles sauraient à peine utiliser leurs doigts ? Nous avons connu beaucoup de pauvres ménages, confiés, une partie de la journée, à des enfants chargées du soin d’autres enfants qu’elles habillaient, amusaient et faisaient manger, suppléant ainsi à la mère absente. Moyennant six francs par mois, cette mère eût pu envoyer ses babies à l’asile ; mais six francs plusieurs fois répétés, sont une somme que l’aînée épargnait en veillant au pot-au-feu comme une femme expérimentée. Pour elle, il n’y avait pas de joujoux, de récréations, de promenades ; amuser ses frères, leur donner la becquée, les porter si elle sortait, c’était là sa tâche. La mère rentrait-elle fatiguée ? l’enfant allait aux provisions, allumait le feu, mettait le couvert, et s’il n’y avait pas d’argent, pas de pain dans le ménage, elle en achetait à crédit ; mal chaussée, mal vêtue, mal nourrie, la souffrance l’étiolait, la misère la frappait, et, si son âme n’eût pas été deux fois forte, dans quel