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— Peut-on savoir à quelles conditions ? demanda madame de Lauraguais avec un sourire amer.

— Tenez, lisez, répondit le maréchal en remettant à madame de Lauraguais la lettre suivante :

« Versailles, 1784.

» Vous m’avez parlé, la dernière fois, avec assez d’humeur, monsieur le maréchal, et vous m’avez fait entendre que j’influais sur les légers nuages qui s’élevaient entre vous et le roi ; on doit excuser ses amis quand un moment d’aigreur les aveugle, et j’ai cru devoir vous répéter par écrit ce que je vous ai dit de vive voix. Je vous assure que je n’ai point cherché à vous desservir ; je ne vous dirai pas que je n’ai pas eu comme vous de légers moments d’humeur, mais vous parveniez bientôt à les faire disparaître. Vous savez que si j’ai distingué d’abord quelqu’un, ce fut vous… »

— J’en ai peur, dit en riant madame de Lauraguais, mais poursuivons.

« Et vous devez voir que jusqu’à présent, vous avez obtenu à peu près ce que vous avez voulu du maître. Vous savez aussi qu’il est sujet, plus que personne, à des inégalités qui feraient croire qu’on est plus mal avec lui dans un moment où il n’est qu’indiférent.

» Je puis vous assurer qu’il vous rend toute la justice qui vous est due. Il lui est bien permis de faire quelques plaisanteries sur des défauts qu’il peut remarquer en vous, car vous n’ignorez pas que personne n’est exempt d’en avoir… »

— Voilà, interrompit la duchesse de Lauraguais, de ces plates vérités qn’on ne dit que pour excuser des méchancetés atroces ; le roi aura mal parlé de vous uniquement pour lui plaire ; il n’est jamais médisant que par faiblesse ; je voudrais savoir quels sont ces défauts dont sa majesté plaisante.

— À quoi bon ? dit le maréchal en riant, vous les connaissez mieux que lui.