Page:Nichault - La Comtesse d Egmont.pdf/36

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

son amour que la déclaration la plus éloquente, et Septimanie y répondait avec la tendresse de son cœur, sans se douter que cette préférence exclusive, cet enchantement de la présence, cet élan d’âme qui la portait vers lui, fussent de l’amour.

Un jour que madame d’Aiguillon et madame de Lauraguais avaient été à Sainte-Geneviève accomplir un vœu pour le rétablissement du maréchal, Septimanie resta seule près de son père.

— Comment trouvez-vous le comte de Gisors, ma chère Septimanie, demanda-t-il tout à coup ; ces dames prétendent qu’il est le plus aimable des jeunes gens de la cour, et je veux savoir si vous êtes de cet avis.

— Mais… je ne sais… répondit Septimanie d’une voix tremblante, je ne puis… juger…

— Si vraiment vous jugez à merveille les personnes qui viennent ici… et prenez-y garde, si vous craignez de dire ce que vous pensez du comte Louis… j’en conclurai…

— Moi, monsieur… je le trouve fort aimable, reprit-elle avec une vivacité qui fit sourire le maréchal.

— Eh bien, j’en suis fort aise, dit-il, les femmes ont parfois des goûts si bizarres, que le mérite et les agréments ne sont pas toujours un droit à leur préférence ; je suis charmé de vous voir apprécier les qualités qui distinguent le comte de Gisors ; il est brave, spirituel, et je le crois destiné à parcourir une carrière aussi brillante que celle de son père. Voilà un événement qui augmente sa fortune présente : la mort de la maréchale de Belle-Isle le fait hériter de…

— Sa mère est morte ! s’écria Septimanie, oh ? comme il doit avoir du chagrin !…

— Sans doute, reprit le maréchal, les premiers moments d’un deuil sont toujours fort tristes ; c’est pourquoi j’ai en gagé son père à me donner tous les instants qu’il passait ordinairement à Versailles. La maison d’un malade est une retraite fort convenable dans sa position. D’ailleurs nous avons à parler d’affaires ensemble, et je ferai une exception pour lui.