Page:Nichault - La Comtesse d Egmont.pdf/40

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— Qu’avez-vous donc appris au maréchal de Belle-Isle ? dit la douairière, ce doit être quelque chose de bien agréable, car il en avait complètement oublié son deuil.

— Je suis mal placé pour savoir le premier les nouvelles, vous en conviendrez, répondit le duc en s’amusant de la curiosité de sa tante, et le maréchal de Belle-Isle, qui voit tous les matins le roi, les sait avant tout le monde.

— Ah ! je devine, reprit-elle, le département de la guerre va lui être confié. C’est à cela qu’il vise, et je ne m’étonne plus de son ravissement.

— C’est un ministère qui lui viendra sans doute, mais ce ne sera pas de sitôt… D’Argenson a su se rendre utile, on ne peut oublier si vite les services qu’il a rendus lors de la révolte du parlement, et bien qu’il déplaise à la marquise, elle n’ose pas le faire disgrâcier.

— Alors je ne comprends rien à la satisfaction que montre le maréchal de Belle-Isle ; la mort de sa pauvre femme ne saurait l’expliquer.

— Et pourquoi ne serait-ce pas ma convalescence qui le mettrait en joie, dit le maréchal en riant ; il a paru très-sensible au plaisir de me revoir.

— C’est que ce plaisir doit lui rapporter quelque chose, dit madame de Lauraguais, car il est connu pour n’attacher de prix qu’à ce qui sert son ambition.

— Ce défaut est si commun qu’on n’y prend plus garde. D’ailleurs, ajouta-t-il, il y a toujours du profit à s’attacher aux ambitieux ; le tout est de si bien se cramponner à eux qu’ils ne puissent s’élever sans vous entraîner dans leur ascension.

— Ainsi vous rêvez une association, une alliance peut-être avec le maréchal de Belle-Isle ? dit madame d’Aiguillon.

— Pourquoi pas ? son crédit, sa fortune, son bâton de ma-