Page:Nichault - La Comtesse d Egmont.pdf/44

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

quand elle vous suppliera de ne rien précipiter. J’ai un projet en tête qui pourrait bien déranger celui-là ; et comme il réu­nirait tous les avantages, ceux que vous trouvez dans le vôtre et ceux que vous lui sacrifiez, il aurait la préférence, croyez-moi.

En disant ces mots d’un ton d’oracle, la duchesse sortit, et laissa le maréchal d’autant plus ébranlé dans sa résolution, qu’il l’avait soutenue avec plus d’entêtement.


VIII

TOUT POUR L’ORGUEIL


M. de Richelieu, désolé de voir s’éterniser sa maladie, en conclut avec raison que les médecins n’y connaissaient rien, et se mit en tête de faire le contraire de leurs ordonnances. On lui avait défendu les bains, il en fit un usage continuel ; prit du petit lait au lieu de sudorifiques, et se gouverna si bien, qu’en moins de quinze jours il recouvra toute sa bonne santé. C’est à cette expérience et à ses connaissances médicinales qu’il prétendait devoir la force et la jeunesse miraculeuse dont il a joui si longtemps.

La réclusion forcée du maréchal privait le roi d’un brave gé­néral, d’un confident dévoué, d’un courtisan spirituel dont la gaieté lui était d’un grand secours ; aussi fut-il vivement ac­cueilli la première fois qu’il revint à Versailles.

Après avoir été reçu du roi de la manière la plus flatteuse, il se rendit chez madame de Pompadour ; elle lui fit enten­dre que ses amis, loin de l’oublier, avaient travaillé pour lui pendant sa maladie, et qu’il en recevrait bientôt la preuve, ce qui voulait dire que grâce à elle et au maréchal de Belle-Isle, il aurait le gouvernement de Guienne, vacant par la mort du prince de Dombes.

Ce beau gouvernement, objet de l’ambition du duc de Ri­chelieu, était une des bases de l’amitié qu’il témoignait au maréchal de Belle-Isle, car l’état de santé du prince de Dom-