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avait bien raison de dire quelquefois qu’on serait tenté de voir tout comme un songe, puisqu’il est impossible de remédier au mal, avec un maître qui se plaît à n’être rien, qui craint de s’occuper, et laisse ses ministres faire tout ce qu’ils veulent. En vérité je suis en colère contre lui, de n’avoir pas assez senti tout ce que vous avez fait[1]. »

Nous donnons les extraits de ces lettres, parce qu’elles prouvent, mieux que nous ne saurions le dire, les intrigues de cour de cette époque, et l’attachement passionné de la duchesse de Lauraguais pour le vainqueur de Mahon. Comment madame d’Egmont aurait-elle pu rester indifférente pour une femme qui aimait et servait si bien son père ?…[2]


XIV

LE JEU CHEZ LA REINE


C’était le temps des cabales de tout genre. Pendant que celles du maréchal de Belle-Isle et du prince de Soubise s’efforçaient d’amortir l’effet de la prise de Mahon, les deux grandes puissances de l’État, le clergé et les parlements, se faisaient une guerre que le roi lui-même tentait vainement d’apaiser. Quand le pouvoir n’est plus à sa place, chacun se le dispute. L’indolence où était tombé Louis XV ranimait toutes les am-

  1. Extrait des lettres de la duchesse de Lauraguais, trouvées dans les papiers du maréchal de Richelieu.
  2. La duchesse de Lauraguais était dame d’atours de Madame la dauphine : lors de la dernière maladie de cette princesse, madame du Deffant écrivait à M. Walpole : « Madame la dauphine brutalisa l’autre jour la duchesse de Lauraguais, qui dit à quelqu’un qui était près d’elle : Cette princesse est si bonne, qu’elle ne veut pas que sa mort soit un malheur pour personne. »
    (Lettre de la marquise du Deffant, t. I.)