Page:Nichault - La Duchesse de Chateauroux.djvu/104

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veloppements dramatiques, pouvaient s’exécuter sans peine sur un théâtre de société.

L’intermède, le ballet, tout fut trouvé ravissant ; d’ailleurs, le roi n’était pas difficile à amuser dans la disposition d’esprit où il se trouvait alors.

Un seul moment, pendant le ballet, on vit son front moins radieux. C’est que mademoiselle de Charolais, la princesse de Carignan, M. de Maurepas et madame de Mauconseil venaient d’arriver.

L’aspect de ces ennemis déclarés de madame de la Tournelle fut désagréable au roi ; mais il pensa que M. Duverney n’avait pu se dispenser de les inviter, par égard même pour celle qu’ils enviaient. Il pressentit tout le parti que leur malveillance allait tirer de cette soirée, le récit qu’ils ne manqueraient pas d’en faire au cardinal de Fleury ; mais il était sous l’influence d’un espoir trop enivrant pour se laisser dominer par aucune crainte ; il était dans un de ces moments si doux et si rares où l’on est insensible à tout, hormis aux coups d’une main chérie.

— Que vous importe ! dit le roi, en lisant sur le visage de madame de la Tournelle la même impression qu’il venait de surmonter, ils ne peuvent plus vous faire de mal.

— Je le pense, dit-elle en souriant d’un air triste ; oui, je n’ai plus qu’un ennemi !

— Eh bien, vengez-vous de cet ennemi à force de générosité, répondit-il du ton le plus tendre. Ce sentiment est le seul digne d’une âme telle que la vôtre.

La princesse de Charolais, conduite par M. Duverney à une place réservée entre la princesse de Conti et la comtesse de Toulouse, fit, en passant, un salut très-froid à madame de la Tournelle ; il est vrai que le duc de Richelieu, debout derrière le roi, paraissait entièrement dominé par l’entretien qu’il ne pouvait entendre, et que la jalousie de mademoiselle de Charolais pouvait se tromper sur le motif d’une attention si prolongée.

Ce séjour délicieux, ce spectacle charmant, cette fête qui avait l’air d’une improvisation magique, dont tout le monde affectait de paraître enchanté, n’occupaient au fond l’esprit de personne ; les moyens de faire oublier son dévouement pour madame de Mailly, d’arriver à prouver à madame de la Tournelle qu’on attendait tout de sa faveur auprès du