Page:Nichault - La Duchesse de Chateauroux.djvu/110

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d’un espoir enivrant, il fut aimable pour tout le monde. Madame de la Tournelle ne put s’empêcher de lui faire entendre combien elle était touchée de le voir si gracieux envers les amis de M. Duverney, qui étaient en partie les siens.

— Tout cela cet votre ouvrage, répondit-il, ce que je ferai de bien ou de mal désormais ne me regarde plus.

Il était minuit passé lorsque le roi partit ; au moment de le suivre, le duc de Richelieu vint dire adieu à madame de la Tournelle. C’était le premier mot qu’il lui adressait depuis l’arrivée du roi. Elle s’en plaignit.

— Si j’avais agi autrement, dit-il, vous m’auriez appelé courtisan ; et il se sauva en lui baisant la main, ravi de la laisser sur cette réponse maligne.

À peine le roi eut-il franchi l’avenue du château, que chacun se répandit en éloges sur tout ce qu’il avait fait et dit ; on espérait qu’il lui reviendrait quelque chose de tant d’exclamations flatteuses.

— Voilà pourtant comme il serait tous les jours, disaient les plus ambitieux, sans son vieux précepteur et sa vieille gouvernante.

Puis d’autres, s’étant assurés que les ministres n’étaient plus là, ajoutaient :

— Avez-vous remarqué que la présence de M. de Maurepas ne lui causait aucune gène ? L’accueil qu’il a fait à Chavigny en est une preuve assez grande.

— En vérité, s’écria madame de Tencin, il est trop beau, trop aimable pour un roi. Avec tant d’autres moyens de séductions, il ne devrait pas être permis aux souverains d’avoir tous les agréments qui feraient aimer un petit bourgeois.

— Je suis bien heureuse de n’être plus jeune, dit la douairière de Froulay, il m’aurait tourné la tête avec son regard si noble, son sourire si doux et ses dents si blanches.

— On m’avait dit qu’il avait l’air fier, imposant, dit une jeune femme qui n’avait point encore été présentée à la cour ; il ne m’a pas fait peur le moins du monde, et je suis sûre de ne pas trembler quand j’irai lui faire mes révérences,

— Rien ne presse, dit son mari ; vous êtes encore trop jeune pour être d’une cour où le maître est, de l’aveu de ces dames, un prince si séduisant.

Cette réflexion sortit madame de la Tournelle de sa rê-